Allouer le bon mix énergétique au bon usage

La transition énergétique n’est plus une option, mais une nécessité. Face au changement climatique, à la raréfaction des ressources fossiles et aux nouveaux impératifs économiques, nous devons repenser non seulement la manière dont nous produisons l’énergie, mais surtout la façon dont nous l’utilisons. Produire « propre » ne suffit plus : il faut consommer intelligemment.

En France, l’ADEME, Agence de la transition écologique, travaille activement sur ces enjeux, en lien avec l’État, les collectivités, et les acteurs industriels. Et parmi les secteurs les plus énergivores, celui de la mobilité tient une place à part : il représente aujourd’hui 32 % de la consommation finale d’énergie dans l’Hexagone, et dépend encore à plus de 90 % des produits pétroliers (SDES, 2023). À l’échelle mondiale, le transport génère un quart des émissions de gaz à effet de serre, ce qui en fait le premier secteur émetteur de CO₂.

Qu’il s’agisse de déplacements par la route, de transport maritime ou aérien, la complexité est la même : il n’existe pas de solution unique. Il faut donc apprendre à allouer le bon mix énergétique au bon usage, en fonction des besoins, des contraintes techniques, des territoires et des usages réels.

Expert en mobilité et énergies propres, 49SUD est un bureau d'études qui collabore sur des projets de pointe, incluant des essais en vol (Daher et DGAC), l’encapsulation de cellules solaires et la sécurité aéronautique avec Airbus

1. Le mix énergétique : diversité, complémentarité, efficacité

Le mix énergétique désigne la combinaison de plusieurs sources d’énergie pour couvrir différents besoins. Chaque source possède ses propres caractéristiques : certaines sont intermittentes, d’autres stockables, certaines sont locales, d’autres importées. Le but n’est donc pas de chercher l’énergie parfaite, mais d’en associer plusieurs de manière cohérente.

Par exemple, dans une maison, on peut très bien coupler des panneaux solaires pour l’électricité de jour, une pompe à chaleur pour le chauffage, et un petit stockage batterie pour lisser la consommation. De même, dans la mobilité, une flotte de bus peut combiner biogaz, batteries et hydrogène, selon les itinéraires, les distances et les temps d’arrêt.

L’hybridation énergétique, quant à elle, est une forme plus réactive de mix : elle consiste à passer automatiquement d’une source à l’autre en fonction de la demande. C’est ce qu’on retrouve dans les véhicules hybrides qui alternent moteur thermique et moteur électrique selon les conditions de conduite.

Un mix bien pensé doit répondre à plusieurs objectifs :
– Efficacité énergétique : produire juste ce qu’il faut, quand il faut
– Maîtrise des coûts : investissement raisonnable, fonctionnement optimisé
– Disponibilité locale : utiliser les ressources du territoire
– Faible empreinte carbone : limiter les émissions directes et indirectes
– Flexibilité : pouvoir adapter l’offre à la demande en temps réel

2. La mobilité : un défi technique, économique et environnemental

La mobilité est au cœur de la problématique énergétique. Elle implique une diversité d’usages : transport de personnes, de marchandises, longues distances, trajets urbains, engins lourds ou véhicules individuels. Chaque cas est différent, et appelle des réponses spécifiques.

Sur la route : des technologies déjà matures

Dans le domaine terrestre, plusieurs solutions coexistent et se développent activement.

Les véhicules électriques à batteries se sont largement démocratisés, notamment en zone urbaine. Leur autonomie progresse régulièrement, et les bornes de recharge se multiplient. C’est la solution idéale pour les trajets courts ou quotidiens. À Paris, la RATP s’est d’ailleurs engagée à verdir l’intégralité de sa flotte d’ici 2025, en combinant électricité et biogaz.

L’hydrogène, quant à lui, représente une alternative très prometteuse pour les usages plus intensifs : camions longue distance, bus interurbains, trains sur lignes non électrifiées. Les stations commencent à apparaître, comme à Toulouse (HyPort) ou Marseille (HyAMMED). L’avantage principal : une autonomie élevée et une recharge en quelques minutes.

Enfin, les véhicules hybrides offrent une flexibilité bienvenue, notamment pour les flottes mixtes ou les collectivités. Ils permettent de réduire la consommation tout en conservant une autonomie importante. Des modèles comme la Toyota Prius ou la Hyundai Ioniq sont aujourd’hui des références dans ce segment.

En mer : une transition progressive mais nécessaire

Le transport maritime représente une part importante des échanges mondiaux… et des émissions. Les navires consomment des carburants lourds et polluants. Pourtant, la transformation est amorcée. Des porte-conteneurs GNL, comme ceux de CMA CGM, ont vu le jour. D’autres expérimentent l’hydrogène, l’ammoniac, ou encore l’assistance par voile pour réduire la consommation, à l’image de Neoline ou Grain de Sail.

L’électrification commence à s’imposer sur les courtes distances (ferries, navettes), notamment dans les pays nordiques comme la Norvège, mais également en France avec le e-navibus à Nantes : Les e-Navibus limiteront au maximum leur impact sur l’environnement et les écosystèmes : à propulsion électrique, ils réduiront les émissions de GES (Gaz à effet de serre) et limiteront leur pollution sonore. À chaque escale, ils pourront bénéficier d’une recharge rapide sur le quai, à bord des prolongateurs d’autonomie garantiront le maintien du service en toute circonstance de navigation sur la Loire (Source Nantes métropole) Mais pour les longues traversées, le défi reste entier.

Dans les airs : le plus grand défi technologique

Décarboner l’aérien est un casse-tête. Les carburants d’aviation durables (SAF) sont une solution à court terme, car compatibles avec les avions actuels. Mais leur production reste marginale et coûteuse.

Les projets d’avions à hydrogène (Airbus vise une mise en service à l’horizon 2035) et d’avions électriques pour de courts trajets (comme l’Alice d’Eviation, 9 places) montrent la voie, mais sont encore au stade de prototype. Le secteur mise aussi sur des gains opérationnels : allègement, aérodynamique, éco-pilotage.

3. Adapter le mix au bon usage : une démarche sur mesure

Chaque cas d’usage mérite une approche spécifique. Il ne s’agit pas d’imposer une technologie, mais de partir des besoins réels pour construire la solution optimale.

Prenons quelques exemples :

  • Un centre-ville avec une flotte de bus à arrêts fréquents et trajets courts ? → l’électrique est idéal.
  • Un port logistique avec des engins lourds fonctionnant 24h/24 ? → le mix hydrogène + batterie devient pertinent.
  • Un territoire rural avec des trajets longs et peu de points de recharge ? → hybride ou hydrogène longue autonomie.
  • Une chaîne logistique entre un aéroport et une plateforme industrielle ? → démonstrateur multimodal à concevoir.

C’est là que la conception de démonstrateurs prend tout son sens : il s’agit de tester une solution dans un environnement réel, avant de la généraliser. Mais pour cela, encore faut-il qu’il réponde exactement au besoin du client.

4. Le rôle du bureau d’études : accompagner, concevoir, tester

Un bureau d’études joue un rôle clé pour transformer une intention en solution concrète. Il ne s’agit pas uniquement de dimensionner un système, mais de co-construire une approche globale :

  1. Compréhension fine des besoins du client (usages, fréquence, autonomie, contraintes)
  2. Rédaction d’un cahier des charges précis et réaliste
  3. Conception du démonstrateur énergétique, en mixant les solutions pertinentes
  4. Mise en œuvre, fabrication, intégration
  5. Tests sur banc d’essai : validation des performances, robustesse, consommation
  6. Mise en service et retour d’expérience

Le banc d’essai est un outil stratégique : il permet de simuler des conditions réelles, d’ajuster les paramètres techniques et de garantir une solution robuste et optimisée.

Conclusion

Il n’existe pas de recette miracle. Mais il existe des solutions efficaces, à condition de bien les choisir et de les adapter aux réalités du terrain.

Un mix énergétique bien pensé, ce n’est pas seulement une combinaison technique : c’est un levier de performance, de durabilité et d’acceptabilité. Pour réussir la transition énergétique dans le secteur de la mobilité, il faut penser usage avant technologie, et collaborer étroitement entre experts, industriels et collectivités.

Le bureau d’études, à ce titre, devient un acteur-clé de la réussite, en transformant des idées ambitieuses en projets concrets, mesurables, duplicables.